L’île de Ré, joyau de la côte atlantique française, est bien plus qu’une simple destination touristique prisée. Au-delà de ses plages de sable fin et de ses villages pittoresques se cache un patrimoine riche en mystères et légendes. Suivez-nous dans cette exploration des curiosités méconnues qui font tout le charme de cette île fascinante.

Une origine entre mythe et réalité
L’origine même de l’île de Ré est enveloppée de mystère et de légende. Selon une croyance populaire, sa création serait liée à de terribles séismes et raz-de-marée ayant englouti une cité romaine nommée Antioche. Seules l’île de Ré et l’île d’Oléron auraient survécu à cette catastrophe. La légende raconte que les ruines de cette cité mythique seraient encore visibles par beau temps.Cette histoire a pris une dimension plus concrète en 1809, lorsqu’un navire s’est échoué sur la patte de Champ Chardon. Le capitaine du vaisseau affirma avoir distingué des dallages de branche calcaire qu’il interpréta comme les vestiges d’une construction romaine. Le célèbre géographe Élisée Reclus mentionne d’ailleurs dans sa « Géographie Universelle » l’emplacement de la ville d’Antioche à la hauteur de Champ Chardon.Selon un dicton local qui fait frémir les habitants : « Quand Antioche réapparaîtra, Ré disparaîtra. »

La mystérieuse pyramide de Saint-Clément-des-Baleines
Une autre légende, quelque peu contradictoire avec la première, évoque des navigateurs de l’Égypte antique envoyés par Ramsès II qui, voulant faire le tour du monde, se seraient échoués aux Martrais, près de l’actuelle ville d’Ars, et auraient construit une petite pyramide.Effectivement, à Saint-Clément-des-Baleines se dresse la fameuse « Pyramide des Chaumes ». Contrairement à ce que suggère la légende, cette construction haute de 4,50 mètres fut érigée en 1824 et servait d’amer, c’est-à-dire un point de repère visible depuis la côte pour les marins. Cette référence architecturale à l’Égypte ancienne reste néanmoins une curiosité insolite dans le paysage rétais.
La chapelle de la Redoute et son histoire maritime
La chapelle de la Redoute, ancienne fortification, abrite une statue de la Vierge dont l’histoire est remarquable. Il s’agit d’un ex-voto offert par des marins autrichiens miraculeusement sauvés après un naufrage en 1880.Plus étonnant encore, c’est l’artiste Suzy Solidor qui a financé la rénovation de cette Vierge en 1951. Figure emblématique de la vie parisienne, Suzy Solidor incarnait la fête et le glamour de l’époque. Femme forte et indépendante, elle a su s’affranchir des normes sociales de son temps, ce qui rend sa contribution à ce monument religieux d’autant plus intéressante.

Les cabanes de douaniers : témoins d’une époque révolue
Le littoral de l’île est ponctué de cabanes de douaniers, vestiges du XVIIe au XIXe siècle. Ces postes de surveillance, occupés jour et nuit tout au long de l’année, servaient principalement à prévenir les vols de poissons et à surveiller le trafic maritime dans le pertuis d’Antioche.Ces modestes constructions témoignent de l’importance historique du contrôle des côtes et des échanges commerciaux dans cette région stratégique.

Le fascinant mausolée du cimetière de Loix
Au cœur du cimetière de Loix se trouve un étonnant mausolée, véritable trésor sculpté : celui de la famille Fournier. Ce monument funéraire impressionnant présente les sculptures du patriarche Louis Gabriel, de son épouse Julie, de leurs enfants Victorine, Eugène et Louise, ainsi que du petit-fils Gabriel.Le plus remarquable est que le sculpteur de ce mausolée n’est autre que Gabriel Jean-Baptiste, fils de Louis Gabriel et père de Gabriel, bouclant ainsi le cercle familial. Bien que le temps et l’érosion du calcaire aient dégradé certains détails, l’œuvre reste un témoignage poignant de l’art funéraire et des liens familiaux.
L’école-clocher du Bois-Plage-en-Ré
Ce qui ressemble de loin à une église ou une chapelle au Bois-Plage-en-Ré est en réalité une école construite en 1902. Sa particularité ? Elle est équipée d’une cloche qui, loin d’annoncer l’Angélus, servait de véritable station météorologique, prévenant les habitants de l’arrivée d’un grain ou d’un changement de vent.Cette utilisation pratique du clocher illustre l’importance des conditions météorologiques pour cette communauté insulaire fortement liée à la mer.

L’église fortifiée de Saint-Martin et son puits secret
L’église Saint-Martin de Ré est un exemple remarquable d’architecture religieuse fortifiée. Mise à sac à plusieurs reprises durant les guerres de religion (l’île était à majorité protestante), elle recèle une particularité rare : un puits intérieur.Sur une île dépourvue de rivières, l’eau représentait une ressource vitale, particulièrement à l’intérieur d’un bâtiment servant de refuge aux habitants pendant les conflits. Le clocher de l’église offre aujourd’hui une terrasse panoramique, permettant d’admirer les trois imposantes cloches nommées Marie-Thérèse, Charles-Catherine et Marie-Pierre-Michel-Samuel.

La maison aux symboles mystérieux de Joël Louis Tezard
À Saint-Martin-de-Ré, on peut admirer la façade énigmatique de la maison ayant appartenu à Joël Louis Tezard, un Niortais protestant qui était à la fois professeur de dessin, romancier et sculpteur.Cette demeure présente deux curiosités fascinantes : un hippocampe et un crâne mystérieux à l’angle de la maison. Mais c’est surtout un relief étrange qui attire l’attention : une pomme d’or entourée de symboles maçonniques. Selon certaines traditions, cette pomme pourrait représenter le Graal ou la pierre philosophale recherchée par les alchimistes.
L’hélice du bombardier Wellington : un hommage émouvant
Dans le cimetière du Bois-Plage repose un vestige poignant de la Seconde Guerre mondiale : l’hélice d’un bombardier Vicker Wellington. Cet avion de la Royal Air Force, parti le 16 octobre 1942 pour miner les côtes françaises, fut abattu par la DCA allemande avec ses six membres d’équipage.L’hélice a été déposée en hommage au pilote néo-zélandais enterré dans ce cimetière, témoignage silencieux des sacrifices consentis pendant le conflit mondial.

L’abbaye des Châteliers et la légende du naufrageur repenti
Notre périple s’achève à l’abbaye des Châteliers, construction du XIIe siècle qui a connu de nombreuses destructions au fil des siècles. Une légende particulièrement saisissante y est attachée : celle du Bleu de Mauléon, baron de Châtelaillon.Ce seigneur, qui aurait fait fortune comme naufrageur, envoya un jour son fils porter un message au roi pour vanter sa richesse et sa puissance. Au retour, le navire du fils fit naufrage. Le lendemain, le baron, espérant un bon pillage, découvrit avec horreur le corps de son enfant bien-aimé parmi les débris.En repentance, il fit construire l’abbaye avant de mourir peu après. Il fut enterré aux côtés de son fils, et depuis, selon la légende, ses cris de douleur résonnent encore les nuits de Noël et de Toussaint.
Une île aux mille facettes
L’île de Ré dévoile ainsi une face cachée, loin des cartes postales touristiques. Entre légendes maritimes, monuments insolites et curiosités architecturales, elle offre aux promeneurs curieux un patrimoine d’une richesse insoupçonnée.Chaque pierre, chaque édifice raconte une histoire, témoignant de la vie insulaire à travers les siècles. Que ce soit en découvrant la pyramide de Saint-Clément-des-Baleines, en méditant devant le mausolée des Fournier ou en écoutant les légendes de l’abbaye des Châteliers, le visiteur entreprend un véritable voyage dans le temps.Ces trésors cachés de l’île de Ré méritent qu’on s’y attarde, qu’on les contemple et qu’on écoute les histoires qu’ils nous racontent, pour apprécier pleinement la richesse culturelle et historique de ce joyau atlantique.La prochaine fois que vous parcourrez les chemins de l’île de Ré, prenez le temps de vous écarter des sentiers battus pour partir à la découverte de ces lieux chargés d’histoire et de mystère. Ils vous révéleront une dimension nouvelle et fascinante de cette île aux multiples visages.
Pour une randonnée enrichissante sur l’île de Ré, n’oubliez pas d’explorer ces trésors cachés qui font tout le charme et la singularité de ce territoire insulaire. Comme je le dis souvent : « Pour une bonne randonnée à la journée, il vous faut un objectif » – et sur l’île de Ré, les objectifs passionnants ne manquent pas !